Télémédecine : l’e-santé en marche ?
Organiser une consultation médicale à distance 24h/24 et 7 j/7, afin d’améliorer les réponses aux situations d’urgence en Ehpad et d’éviter les hospitalisations inutiles ? C’est la promesse de la télémédecine, et le souhait de l’ARS Île-de-France, qui a retenu, le 28 juin, dans le cadre d’un appel à projet, l’expérimentation pilote d’Orpéa-Clinéa : E-Vline.
Usant des avancées des télécommunications, la télémédecine d’E-Vline devrait permettre aux soignants en Ehpad de mieux gérer les urgences de week-end et de nuit. Concrètement, le projet consistera dans un premier temps à relier les Ehpad volontaires à une clinique psychiatrique et un service de soins de suite et de réadaptation (SSR) pour réaliser des consultations à distance en cardiologie et en psychiatrie (les plus forts besoins, aux délais d’attente pouvant atteindre jusqu’à deux mois. Objectif de ces consultations : limiter les transferts en ambulances et les hospitalisations intempestives, « délétères pour des résidents »,explique le Dr Linda Benattar, gériatre, directeur médical de la division maisons de retraite d’Orpéa et fervente partisane de cette méthode.
Préserver un équilibre fragile
C’est souvent pour des crises mineures mais « impressionnantes, et angoissantes, tant pour le résident que le soignant », et pour des raisons sociales que les personnes âgées sont hospitalisées par les urgentistes. En moyenne, chaque mois, un Ehpad enregistrerait 10% de consultations d’urgences, pour 100 résidents en moyenne. « Un chiffre certainement sous-évalué », note le Dr Roxane Simon-Prel, chargée des questions médico-économiques du projet. En Île-de-France, cela représenterait en moyenne 500 à 600 transports par mois. « Le but est que ces transferts soient vraiment justifiés et accompagnés. La qualité de l’acte médical est largement conditionnée par le fait d’être programmé. En urgence ce ne sont que des gestes de réparation. Et puis, consultants et spécialistes sont submergés par les demandes venues d’Ehpad. Cet engorgement mériterait d’être évité », précise à son tour le Dr Daniel Kharat, directeur des projets médicaux.
Pour assurer l’acte de consultation en ligne, Orpéa à mis le prix. L’équipement, constitué pour le médecin de garde (ou « requis »), d’un ordinateur à deux écrans, coûte quelques 20 000 euros. Du côté Ehpad (ou « requérant »), il vous faudra débourser pas moins de 100 000 euros pour obtenir le « chariot mobile », constitué de deux moniteurs pour la visioconférence et la visualisation des données, d’un électrocardiogramme communiquant et de capteurs pour mesurer tension, pouls, saturation d’oxygène, glucose et température.
Avec le déclenchement de l’acte de télémédecine, le document de liaison d’urgence (DLU), présentant les antécédents et les soins en cours du patient, est exporté vers la plateforme web. Une série d’alerte vers le médecin requis se déclenche alors. En se connectant, celui-ci visualise le résident, ainsi que toutes les informations sur son dossier de santé et ses analyses en temps réel. « Ce patient peut il être soigné sur place, en toute connaissance des risques, ou doit-on procéder à une hospitalisation ? Voilà la question que doit se poser le médecin, explique le docteur Benattar. Si une infirmière est présente, on peut envisager des prescriptions de soins, qui vont passer par une interface écrite pour conforter la discussion avec le soignant ». Le médecin conclue l’acte médical en rédigeant une fiche d’intervention qui rejoint le logiciel médical.
Démocratiser la télémédecine en Ehpad sur tout le territoire
S’il contribue à améliorer le bien-être des personnes âgées et à sécuriser leur séjour, « le challenge » E-Vline, est aussi, souligne le docteur Benattar, une occasion « de montrer aux Agences régionales de santé (ARS) quelles économies la télémédecine apporte et quel bénéfice qualitatif elle a pour le patient ». Son aspect régional structurant a également été un élément clef dans la sélection de l’ARS. Car le concept n’est pas uniquement destiné au groupe Orpéa ; et devrait permettre d’intégrer par la suite au projet des Ehpad publics et associatifs. « Avec la télémédecine on peut très bien lier l’Ehpad de Saint-Rémy avec un médecin chinois ! Mais ici, l’idée est de connecter des médecins de courts séjours du territoire avec des Ehpad, pour que des liens se créent en cas d’hospitalisation du patient, note le Dr Roxane Simon-Prel. Cela conforte les filières gériatriques et permet aux établissements de mieux se connaître. »
Inspiré par la technologie américaine, le projet sera testé dès mai 2013, pour 3 ans, sur trois départements : les Yvelines (78), le Val d’Oise (95) et le Val-de-Marne (94). « Il y aura une première phase pilote qui ne concerne que l’urgence, mise en place en mai 2013 pour 4 Ehpad et 2 établissements hospitaliers, détaille le docteur Daniel Kharat. À l’automne 2013, nous étendrons le projet à 17 Ehpad, dont deux externes au groupe Orpéa choisis par l’ARS et nous ouvrirons la télé-expertise psychiatrique. Dans une troisième phase de déploiement, le projet E-Vline devra être élargi à tout le groupe Orpéa.
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