Retraite, bien vieillir, fin de vie : un triptyque impensé
L'édito du Mensuel des Maisons de Retraite n°260 (Avril 2023).
Le hasard du calendrier politique et parlementaire a conduit en 2023 à ce que trois sujets arrivent sur le devant de l’actualité sans que personne n’ait jamais pensé à les lier.
Lors de l’élection présidentielle de 2022, le candidat Emmanuel Macron s’est engagé à réunir une Convention citoyenne pour débattre de la fin de vie dans la perspective, possible, de faire évoluer le dispositif législatif. Cette Convention s’est réunie de décembre dernier au 2 avril, jour où elle a remis ses conclusions et où s’est dégagée une assez large majorité en faveur de l’aide active à mourir. Et le 3 avril, Macron a annoncé qu’un projet de loi serait prêt « avant la fin de l’été ». De quoi réjouir Agnès Firmin Le Bodo qui porte ce dossier depuis longtemps comme députée puis désormais comme Ministre. Lectrice attentive du Mensuel, elle a accepté de nous recevoir pour un entretien dans lequel elle réaffirme notamment la nécessité de développer massivement la culture palliative dans les Ehpad.
Autre promesse du candidat Macron tenue par le Président Macron : la réforme des retraites. Peut-être en avez-vous entendu parler depuis 6 mois si vous avez allumé une télé ou une radio… Le postulat ? Avec l’allongement de la durée de la vie et l’évolution consécutive du ratio actifs/inactifs, cette réforme consistant à travailler deux ans de plus, jusqu’à 64 ans, était, a soutenu le Gouvernement, indispensable. La loi validée par le Conseil Constitutionnel est désormais sur les rails quand bien même continue-t-elle à être contestée par une majorité de français.
Enfin, dernier sujet : le grand âge. Lui fait toujours l’objet d’un immense cafouillage depuis 2018. Après avoir promis lui-même une loi, Emmanuel Macron est ensuite parvenu à convaincre ses propres ministres d’expliquer pourquoi une « grande loi » était… inutile. On a donc eu droit à un CNR qui doit déboucher début juin sur une « feuille de route » que Combe a annoncée, mais que la Première Ministre n’a même pas mentionnée dans ses priorités des 100 jours… On a eu droit ensuite à une PPL malingre qui depuis a été renforcée par quelques amendements intéressants avant qu’il soit mis fin au débat au niveau de l’article 6… Elisabeth Borne s’est engagée à ce que cette PPL poursuive son chemin et soit adoptée… « à partir de la rentrée 2023 ».
Mais ce qui frappe dans cet agenda erratique c’est que personne n’ait cru bon de lier ces trois projets politiques portés par des ministres différents (Firmin Le Bodo, Dussopt, Combe). Il y aurait pourtant eu matière à engager un vrai grand et beau débat sur le troisième tiers de la vie. Comment on considère sa retraite, comment on vieillit dans de bonnes conditions, comment on meurt dignement. Mais ce débat de société, global, civilisationnel, quasi-anthropologique, nous n’y aurons pas droit. Chaque sujet a été traité en tuyaux d’orgues sans cohérence, sans créer des ponts entre eux, sans esquisser un dessein. Au-delà des atermoiements, au-delà des stop-and-go perpétuels, ce qui est peut-être le plus désolant c’est cette incapacité des gouvernants actuels à penser l’avenir.
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