Réforme des diplômes :
quels impacts pour les médecins coordonnateurs ?
Tant attendue, la fameuse réforme du diplôme d’études spécialisées (DES) est désormais à l’œuvre avec une disparition annoncée de la capacité en gériatrie. Quelles seront les conséquences à long terme pour les médecins coordonnateurs ? Pour l’instant l’avenir reste flou…
Bien évidemment, la réforme du diplôme des études spécialisées (DES) entrée en vigueur le 1er novembre dernier et qui consacre la gériatrie comme une spécialité à part entière, n’est pas directement évoquée par la mission “Flash” sur les Ehpad, mais celle-ci a incontestablement un impact sur les médecins coordonnateurs. Ces derniers ne sont d’ailleurs pas vraiment défavorables à cette réforme. On lui trouve même certaines vertus, comme en témoigne Renaud Marin la Meslée, vice-président du SNGIE : « je n’ai rien contre cette réforme. Il est normal que la gériatrie acquière ses lettres de noblesse en devenant une vraie spécialité. »
Pourtant, celle-ci aura pour effet, au moins à moyen terme, de faire disparaître la fameuse “capacité en gériatrie”, le diplôme largement le plus utilisé par la profession pour se former. « En créant cette spécialité, nous avons obtenu que la capacité soit maintenue jusqu’en 2020 ou 2021, afin d’assurer un tuilage entre cette dernière et la sortie des premiers gériatres issus du DES. Par conséquent, il devient impératif d’organiser une formation spécifique aux fonctions de médecin coordonnateur », annonce Claude Jeandel, président du Conseil National Professionnel (CNP) de gériatrie. Et c’est bien là que les choses se corsent, car en dépit des apparents consensus, la profession apparaît plus que divisée sur le contenu de cette formation qui reste à définir. Tandis que Claude Jeandel considère que celle-ci devra prendre la forme d’une « formation diplômante universitaire nationale », certains ne l’entendent pas de cette oreille. « Remplacer la capacité par un diplôme universitaire est une mauvaise option pour deux raisons, au moins. La première est que la plupart des médecins coordonnateurs sont d’anciens médecins généralistes qui ne peuvent s’absenter de leur cabinet sur une longue période pour reprendre des études universitaires. La deuxième est que cette formation doit être prodiguée par des acteurs de terrain qui connaissent les contraintes du métier : les médecins coordonnateurs eux-mêmes », affirme ainsi Renaud Marin la Meslée.
Mais les craintes des médecins coordonnateurs ne concernent pas uniquement la capacité. Beaucoup d’entre eux voient également dans cette réforme des diplômes, une menace directe pour la profession dans sa forme actuelle et ils n’ont pas forcément torts, si l’on s’en tient aux déclarations d’Arnaud Caupenne, membre de l’Association des jeunes gériatres hospitaliers : « faut-il donner au médecin coordonnateur la possibilité de prescrire ou alors organiser la coexistence au sein de chaque établissement, d’un médecin prescripteur, en l’occurrence un gériatre, et d’un médecin coordonnateur ? Je n’ai pas de certitudes sur le sujet, mais le débat mérite d’être ouvert. Pour l’instant, le nombre de gériatres est insuffisant pour assumer ce type de missions mais avec la réforme du diplôme d’études spécialisées, leur nombre va augmenter et il faudra envisager cette option. » Une option qui, bien évidemment, est loin de ravir la profession. Selon Pascal Meyvaert, médecin coordonnateur en Alsace, cette hypothèse serait extrêmement dangereuse d’abord car les sous-effectifs de gériatres demeurent bien supérieurs à ceux des médecins coordonnateurs, mais aussi car le soin risque de prendre le pas sur la coordination en établissement.
D’autre part, cette perspective d’organisation écarte également les médecins généralistes des établissements. « Or ces derniers apportent bien souvent un regard nouveau, viennent soulager les médecins coordonnateurs pour ce qui est du soin et constituent un repère important pour bon nombre de résidents. » Bien évidemment, au regard des effectifs actuels de gériatres formés, à peine 250 cette année, et de leurs intentions encore très rares de pratiquer un jour en Ehpad, cette perspective demeure bien lointaine. Mais la tendance à la fameuse « sanitarisation » des établissements pourrait un jour faire son œuvre. La suite donc au prochain épisode…
L’Association des jeunes gériatres hospitaliers (AJGH) a pour objectifs de fédérer la génération émergente des jeunes gériatres en France, mais aussi de promouvoir une pratique gériatrique de qualité chez les jeunes médecins, quelle que soit leur formation et leur spécialité. « Notre structure est née en 2002 mais elle s’est vraiment développée à partir de 2004, lorsque la gériatrie est devenue une spécialité », raconte Arnaud Caupenne, membre de l’association et chef de clinique-assistant au sein du service de médecine gériatrique du CHU La Milétrie, à Poitiers. Aujourd’hui, l’association, filiale de la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie (SFGG), compte plus de 400 membres partout en France. Elle entend poursuivre son développement à la suite notamment de l’entrée en vigueur de la réforme du diplôme des études spécialisées le 1er novembre dernier. « Nous sommes en pleine réflexion pour faire évoluer notre association, afin de représenter au mieux l’ensemble de la jeune génération de gériatres avec, en ligne de mire, la mise en place de journées associant réflexions scientifiques et discussions autour de nos exercices respectifs ». Mais au-delà de tous ces objectifs, l’AJGH entend changer l’image du sujet âgé dans la société : « les personnes âgées sont le plus souvent associées à la perte d’autonomie. On les perçoit bien souvent comme une charge. Nous voulons montrer que malgré leur âge, elles ont une parole à porter et que leur contribution à la société peut s’avérer d’une grande richesse ».
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