Personnels soignants en Ehpad : la grosse fatigue
Largement mobilisés durant le printemps, les personnels soignants présents en Ehpad payent au prix fort la tension générée par la deuxième vague. Une situation de plus en plus préoccupante…
La question des effectifs est évidemment une problématique récurrente pour les Idec. La crise du printemps avait exacerbé le phénomène. La deuxième vague l’a fait exploser. Comment se -manifeste-t-il ? Présidente de la FFIDEC, Anne-Hélène Decosne est sans doute une des mieux placée pour le décrire. « On assiste à une vraie lassitude chez les personnels de santé qui sont proprement dégoutés de la profession à cause des promesses non tenues en termes de revalorisation, mais aussi des conditions de travail durant la crise. Nombre de salariés choisissent de quitter carrément le secteur pour se reconvertir ailleurs, dans un autre domaine. La perte de sens est énorme. » Une tendance inquiétante qui peut s’expliquer par de multiples facteurs, notamment le manque de formation et plus généralement le modèle des Ehpad : « De nombreuses jeunes aides-soignantes se sont retrouvées et se retrouvent encore confrontées à des situations extrêmement violentes en Ehpad avec des vagues de décès auxquelles elles n’étaient pas préparées, sans avoir les moyens de faire face, en raison du manque de moyens médicaux au sein des établissements. Si le modèle des établissements n’évolue pas rapidement, le découragement ne va pas cesser de gagner du terrain. » Dans ce contexte, les modèles de recrutement rapide des professionnelles pour faire face à l’urgence ne va sans doute pas arranger les choses. « Aujourd’hui, on envisage d’engager des aides-soignantes après 15 jours de formation. Que va-t-on dire à toutes celles qui ont pris le temps de travailler leurs compétences durant un an ? »
Renforcer l’encadrement de proximité
Selon Anne-Hélène Decosne, cette situation est d’autant plus difficile à gérer que les missions des personnels ne cessent de se multiplier à cause de la crise. « Si vous mettez bout à bout, les sous-effectifs chroniques à la suite de salariés mis à l’isolement, l’encadrement des visites des familles, les phases de tests, le confinement en chambre dans les établissements touchés ou encore la gestion des ailes sécurisées avec les équipements que cela suppose, le temps disponible pour les résidents ne cesse de se réduire. » A cela, il faut ajouter les défaillances des plateformes et autre réserves sanitaires qui peinent encore à produire tous leurs effets. « Nombre de personnels libéraux inscrits sur ces plateformes ont souhaité aider durant la première vague mais n’ont jamais été contactés. Ils sont aujourd’hui découragés et sans doute moins disponibles. »
Tout ceci a évidemment un effet sur la santé et la fatigue des personnels, de plus en plus à la merci d’une erreur ou d’une fausse manipulation. « De plus, la spirale de la maltraitance par manque de temps peut s’installer, instaurant une très grande souffrance au travail. » Pour faire face, la présidente de la FFIDEC insiste sur la nécessité de renforcer le management de proximité. « Il faut être au plus près de leurs préoccupations en proposant un cadre qui va les sécuriser et leur apporter des solutions. Tout ceci passe également par des espaces leur permettant de s’exprimer, ainsi que de la formation pour les soutenir dans leurs pratiques. Sans cette démarche, l’édifice peut s’écrouler à tout moment… »
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