Médecin coordonnateur, médecin traitant : qui tient les rênes en matière de vaccination ?
Le succès d’une campagne de vaccination en Ehpad repose sur une bonne collaboration entre le médecin coordonnateur et le médecin traitant, mais ces deux acteurs ont parfois des objectifs contradictoires.
La campagne de vaccination contre la Covid pourrait être qualifiée de parenthèse. Devant l’urgence de la situation sanitaire dans les Ehpad, les médecins coordonnateurs et les médecins traitants ont globalement avancé la main dans la main quand il s’est agi de vacciner un nombre considérable de résidents, parfois dans des délais très courts. Mais cette alliance de circonstance est peut-être l’arbre qui cache la forêt car dans la vie normale, les médecins coordonnateurs ont parfois un mal de chien à mobiliser leurs homologues libéraux autour de la mise à jour vaccinal des résidents.
En fait, la détermination de la place du médecin traitant et du médecin coordonnateur en matière de vaccination repose sur une forme de contradiction. Alors que le médecin traitant est en charge de la santé de ses malades, ce qui correspond à quelques résidents dans l’établissement, le médecin coordonnateur doit se situer dans une perspective plus collective, en réfléchissant en terme de santé publique et en envisageant la protection de tous les résidents dans le cadre du projet de soin. « Cette double approche peut être à la source d’incompréhensions, voire de tensions, notamment quand le médecin traitant par manque de connaissance de l’impact de certaines maladies chez les personnes âgées, ou en raison de croyances refusent de s’inscrire dans la perspective collective du médecin coordonnateur », explique Monique Le Blévec, médecin coordonnatrice en région parisienne.
Une vigilance lors de l’admission
Une analyse que partage Xavier Gervais, vice-président de la FFAMCO, qui rappelle que dans la pratique, le médecin coordonnateur peut se heurter à une difficulté d’accéder au médecin traitant, notamment dans les déserts médicaux, et à l’intransigeance de certains libéraux qui ne jugent pas utile de procéder à certaines vaccinations « comme celle du zona par exemple ».
Le problème se pose en particulier lors de l’entrée des résidents en établissement en raison du statut vaccinal très incertain des personnes adultes. La plupart du temps en effet, les différents rappels n’ont pas été réalisés et nul ne sait où ils en sont. « Après 65 ans par exemple, de nombreux résidents n’ont pas leur rappel pour ce qui concerne le -tétanos », rappelle Pascal Meyvaert, président du SMCG-CSMF.
Pour éviter de passer à côté de la vaccination, il convient, selon Xavier Gervais, de réaliser dès l’admission un bilan complet, en faisant le point sur la vaccination contre la poliomyélite, le tétanos, la diphtérie, la coqueluche, mais aussi le pneumocoque et le zona. Ce bilan est partagé avec le médecin traitant qui va réaliser les prescriptions nécessaires pour ne passer à côté d’aucune maladie à prévention vaccinale. Fariba Karibian, directrice médicale de Korian France, précise que ces données en matière de vaccination devront être également transmises aux familles afin de les rassurer et de les informer sur les différentes campagnes et rappel pour qu’elles ne soient jamais prises au dépourvu. « Des échanges et bilans autour de la vaccination peuvent aussi avoir lieu avec le médecin traitant dans le cadre des commissions gériatriques. Si les médecins traitants ne peuvent être physiquement présents, ils peuvent y intervenir à distance. »
Co-président de MCOOR, Gaël Durel va même plus loin. Pour lui, il ne fait aucun doute que le médecin coordonnateur doit être responsable de l’ensemble des pratiques de prévention au sein de l’Ehpad avec en premier la maitrise de l’ensemble des vaccinations au sein de l’établissement (vaccination contre la COVID, la grippe ou encore le pneumocoque…). Plutôt qu’une impulsion politique pour favoriser la vaccination des résidents, il conviendrait selon lui de s’appuyer sur une véritable démarche scientifique. Bref, un grand chantier qu’il reste encore à mener pour optimiser la vaccination des résidents en Ehpad.
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