Le tarif global au compte-goutte
Le gouvernement avait annoncé fin septembre la réouverture « maîtrisée » du tarif global en 2014, après trois ans de gel. Il a tenu parole : les moyens financiers sont limités et les agences régionales de santé (ARS) auront un rôle décisionnaire, selon un projet de décret que Le Mensuel des Maisons de Retraite s’est procuré. De quoi susciter la fronde de quatre fédérations de gestionnaires et directeurs d’Ehpad.
Le secteur attendait le dégel depuis 2011 et il a enfin eu gain de cause : le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2014, présenté fin septembre, prévoit une enveloppe de 10 millions d’euros [pour] rouvrir le tarif global en Ehpad, « dans des conditions maîtrisées ».
Environ 60 Ehpad concernés sur toute la France
Pour mesurer le degré de maîtrise atteint, il suffit de comparer cette somme à « l’hypothèse raisonnable » de 80 millions d’euros sur deux ans évoquée dans un rapport rédigé fin 2011 par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Michèle Delaunay elle-même l’a admis devant les députés : « Tous les établissements ne seront pas concernés par cette première vague de réouverture ». De fait, une soixantaine seulement devrait passer au tarif global l’an prochain, selon un calcul simple : pour un Ehpad de 80 lits avec un GMP à 750 et un PMP à 180, le surcoût est de l’ordre de 160 000 euros. Il y aura donc peu de reçus et beaucoup de déçus.
Pour compliquer encore un peu l’exercice, la DGCS a sorti de son chapeau un projet de décret qui confie ce choix aux directeurs généraux d’ARS. Evidemment, l’administration centrale préfère parler d’un « choix négocié », mais en réalité, c’est bien le bras armé de l’Etat qui aura le dernier mot, « dans la limite de [ses] moyens financiers » – c’est-à-dire moins de 3 établissements par région. Sachant par ailleurs que le seul autre critère mentionné vise « le respect des objectifs en matière de qualité et d’efficience du système de santé », la compétition s’annonce aussi relevée qu’arbitraire.
Colère… en attendant la circulaire
C’est peu dire que le texte a été mal reçu par les fédérations de professionnels du secteur, d’autant plus qu’elle l’ont découvert dans leur convocation à la prochaine réunion du Comité national d’organisation sanitaire et sociale (Cnoss), qui se prononcera sur ce décret mercredi prochain.
Dans un communiqué commun diffusé hier, la Fehap, la Fnadepa, la Fnaqpa et l’AD-PA dénoncent « un recul des droits des gestionnaires », soumis à « un rapport de force inégal » avec les ARS. Ces organisations, qui s’opposent depuis trois ans aux circulaires tarifaires gelant le tarif global, demandent a être reçues « au plus haut niveau (…) avant de s’engager dans des travaux réglementaires mal préparés ».
Cette réaction spontanée est compréhensible, mais ce décret ne sera pas le seul vecteur juridique, surtout lorsqu’il s’agira de détailler les critères de sélection des Ehpad. Une circulaire budgétaire pourra apporter des indications plus précises aux ARS fin 2013 ou début 2014. Ce qui laisse encore le temps d’arriver à un « choix négocié ».
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