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25 avril 2023

Bien commun

paru dans Le Journal du Domicile

La rue gronde depuis des semaines. Et elle n’est pas près de s’arrêter après la promulgation d’une réforme qui apparaît injuste, autoritaire et qui touche à une pierre angulaire de notre modèle social : les retraites. Cotiser toute une vie de labeur afin d’assurer ses moyens de subsistance pour la vie d’après, n’est pas un petit sujet. Ni individuellement, ni collectivement. Cela constitue même ce que l’on appelle un bien commun, un bien qui nous appartient à tous. Or, on ne peut s’attaquer à un bien commun sans débat de société profond et préalable.

L’idée même que se fait ce gouvernement de la concertation pose question. On ouvre un Conseil National de la Refondation, avec une référence un peu pompeuse au CNR historique, le vrai, le Conseil National de la Résistance. S’en suit une multitude de thématiques, de débats, de réunions, de propositions et de synthèses, qui risquent d’aboutir à des conclusions peu lisibles et à des mesures opérationnelles limitées, à l’instar du grand débat national de 2019, dont personne ne se souvient des aboutissements.

Dans le même temps, on fait passer en force une réforme à laquelle 7 Français sur 10, et même 9 salariés sur 10, sont opposés. A un moment il faut choisir, soit on écoute les citoyens, soit on ne les écoute pas. Mais on ne peut pas le faire de façon sélective. L’aide à domicile appelle au secours depuis des années. Certes, des mesures de financement ont été prises et elles ne sont pas neutres, mais elles relèvent plutôt d’ajustements tarifaires que d’une politique ambitieuse visant à tenir la promesse du virage domiciliaire.

 Au moment où Orpea a montré ce que la crise des Ehpad pouvait produire de pire et qu’il a fallu aller jusqu’à la prise de contrôle public du groupe via la Caisse des dépôts, comment ne pas penser l’anticipation d’une crise à venir dans l’aide à domicile ? Pourquoi la puissance publique ne pèse-t-elle pas de tout son poids pour refonder le secteur, puisque tel est le verbe désormais en vigueur ? Parce que les personnes âgées seraient peu dignes d’intérêt tant qu’on ne prouve pas qu’elles sont maltraitées ?

Le dialogue social et les appels des Français ont été totalement ignorés lors de la réforme des retraites. Qu’en sera-t-il concernant la loi grand âge ? La dernière séquence parlementaire a laissé un peu d’espoir et beaucoup d’interrogations. La proposition de loi bien-vieillir, présentée par le gouvernement, pensée comme une des trois briques de la réforme du grand âge, a laissé à peu près tout le monde sur sa faim. Mais les députés ont approuvé une série d’amendements instaurant une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, ce qui obligerait le gouvernement à faire preuve d’ambition et de vision prospective.

Enrichi par la commission des affaires sociales, le texte contient désormais 33 articles contre un famélique 14 à l’origine. C’est à peu près tout pour les bonnes nouvelles, puisque les débats se sont ensuite enlisés avec encore 400 amendements à examiner. Ils reprendront début juin. Et ce n’est peut-être pas si grave, l’important étant d’arriver à donner de la substance et de l’opérationnalité à une loi attendue de très longue date, qui correspond à un profond choix de société, à un véritable bien commun. La démocratie s’honorerait à lui donner toute sa valeur.

Patrick Haddad
Rédacteur du Journal du Domicile


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