Agisme et antagonismes
La grande désillusion ? C’était le mois dernier. Le début de sortie de crise sanitaire ? Pas avant la fin de l’été. La loi grand âge ? Pas pour ce quinquennat. Alors, dans quel moment sommes-nous exactement ? Dans quel temps sociétal et politique se trouvent les personnes âgées et celles et ceux qui s’en occupent et s’en préoccupent ?
La mobilisation des acteurs sur le terrain, elle, est constante. Ce mois-ci, l’opération urgence domicile en a été un des exemples ; le travail réalisé par les fédérations professionnelles pour éviter la limitation du crédit d’impôt en a été un autre, et il a payé. Les propositions pour améliorer le sort des salariés du domicile sont sur la table depuis longtemps et la pression ne doit pas faiblir tant c’est la priorité dont a priori, tout le monde a conscience. Mais rien ou peu ne bouge. Jusqu’à quand ?
Le domicile, c’est le lieu de vie où plus de 80% des Français veulent vieillir. La considération pour l’aide à domicile, c’est en réalité la considération pour les personnes âgées, c’est le regard porté sur la vieillesse et sur la place des aînés dans notre société. Et ce débat s’est posé avec une acuité toute particulière pendant cette crise sanitaire.
Avons-nous sacrifié une partie de la jeunesse pour protéger nos séniors ? Qui a payé le plus lourd tribut à la crise : les plus de 65 ans qui représentent 90% des personnes décédées du Covid ou tous les jeunes qui auront passé 15 ou 20 mois en demi-teinte à une période charnière de leur vie ? Et, au fond, est-ce ainsi que doit se poser le débat ?
Doit-on renforcer la société des antagonismes autour d’un clivage jeunes / vieux ou bien y’a-t-il encore moyen de consolider une société de la solidarité intergénérationnelle ? C’est à cette question, liée au supposé âgisme de notre société, que nous consacrons notre dossier. Inspirés par ces réflexions actuelles et enrichis par l’éclairage nouveau apporté par le philosophe Fabrice Gzil sur la dimension éthique de la prise en charge du vieillissement, mais aussi par la verve de Francis Carrier et de sa Grey Pride qui secoue les idées reçues avec une campagne #parolesdevioc qui détonne. Des prises de position essentielles tant, le nez sur le guidon durant la gestion de crise, nous pouvons manquer de nous poser les questions fondamentales.
Patrick Haddad
Rédacteur du Journal du Domicile
Retour aux actualités